Le Détective Public...

AFFAIRE CLASSÉE


Après une courte pause, je pris mon air le plus rébarbatif et m'approchai subitement de mes derniers suspects. Cédant sans doute à la panique, mon truand décida aussitôt de passer aux aveux! Depuis le tout début, je le soupçonnais de quelque chose mais je ne savais pas de quoi il s'agissait. Il m'avait tout simplement l'air louche, tout comme le borgne d'ailleurs! Il paniqua sans doute au souvenir de l'interrogatoire serré que je lui avait fait subir dans la pièce aux bonbons. D'ailleurs dès que je le regardais, il devenait vert. Probablement un effet secondaire des SmartiesTM!!!

Devant tous ses comparses réunis, il m'avoua alors que c'était son chef qui lui avait commandé de nuire le plus possible à mon enquête afin de m'empêcher de découvrir la vérité. Quelle vérité lui demandai-je? Il ne se savait pas, il recevait ses ordres du chef par l'intermédiaire du seul complice qu'il connaissait; le chauffeur de taxi. Je refusai tout d'abord de le croire mais lorsqu'il se mit à pleurer à chaudes larmes sans pouvoir s'arrêter, je dû me rendre à l'évidence, il disait la vérité.

Je regardai alors mon ex-ami le chauffeur de taxi de mon air le plus sinistre. Même s'il ne voulait rien en laisser paraître, cela lui fit de l'effet car son oeil au beurre noir devint tout blanc! Il se mit alors à bégayer que ce n'était pas de sa faute, qu'il n'était qu'un pauvre chauffeur de taxi en manque d'argent et qu'il ne faisait que suivre les ordres de quelqu'un qu'il refusait de nommer. Pourtant chaque fois qu'il disait cela, je le voyais jeter subrepticement un coup d'oeil (au beurre noir) vers le gérant de l'hôtel qui m'avait évincé.

Je me tournai alors vers celui-ci et, comme je m'y attendais, il me dit qu'il n'avait rien à voir là-dedans. J'insistai pourtant mais il refusa derechef d'admettre quoi que ce fut. Il passa pourtant à table dès que je l'eus menacé de porter plainte à la Régie des Loyers pour éviction illégale. En effet, lors de mon éviction, je n'avais pas reçu l'avis officiel en trois exemplaires comme l'exige la Loi. Je n'en avais reçu que deux et demi, le pit-bull du voisin en ayant bouffé la moitié du dernier après une âpre lutte avec le facteur. Devant mes menaces, il n'eut d'autre choix que de m'avouer qu'il recevait ses ordres du prêteur sur gage auquel j'avais jadis confié mon canari.

Pendant tout ce temps, le prêteur sur gage avait eu l'air tranquille et sûr de lui. Je commençai alors à l'interroger subtilement sans rien tirer de lui. Pourtant, c'était sûrement un sentimental car au moment où je lui parlai de mon canari, il perdit son air serein! Comme ses complices avant lui, il céda devant mon interrogatoire implacable et m'avoua que c'était bien lui qui m'avait fait parvenir l'exorbitante demande de rançon mais que ce n'était pas son idée. Comme preuve, il me montra sa carte d'abonné du Journal de Montréal alors que je me souvenais très bien que les lettres utilisés dans la composition du message ne pouvait provenir que du Devoir! Quelqu'un lui avait donc fourni le journal. Il ne tarda pas à me désigner le borgne qui louchait dans son coin comme étant celui qui lui avait donné ses instructions.

Je me plaçai aussitôt face au borgne mais comme il ne semblait pas me voir, je me déplaçai un peu à gauche. Il fut tellement surpris qu'il se jeta aussitôt à genoux et avoua cinq ou six crimes dont aucun n'avait à voir avec cette histoire. De plus, il me disait tout ça dans le dialecte local de Cayo Caca que j'ai toujours autant de mal à comprendre. Pourtant, de temps à autres dans son discours autrement incompréhensible, je croyais reconnaître un nom; celui de Manuel D'Instructionne.

De mon air le plus menaçant, je m'approchai alors de Manuel en me remémorant le temps que nous avions passé ensemble dans la cantina Cayo Caca. Un curieux bruit se fit alors entendre et devant les regards ébahis que tous portaient en ma direction, je dû me rendre à l'évidence, les bruits provenaient bel et bien de mon estomac qui se souvenait lui aussi du Potage aux Couleurs que j'avais ingurgité lors de ce fameux repas à la cantina. Je commençai avec lui par la douceur mais comme il refusait de me donner quelques renseignements que ce soit, je changeai de tactique. Je le menaçai alors de l'emmener dans un endroit où il serait forcé de ne manger que des hot-dogs et de la poutine jusqu'à ce qu'il avoue son rôle dans cette histoire. Avec fierté, je le vis alors à son tour jouer les caméléons et finalement, de l'air abattu d'un chien qui vient d'atterrir dans huit pots de peinture de couleurs différentes, il m'indiqua qu'il tenait ses ordres directement du chauffeur chinois obsédé par sa montre.

Le chauffeur chinois commença par s'excuser de m'avoir oublié dans le coffre avant de la Volks à Cayo Caca en m'expliquant qu'il avait rencontré un ami et qu'ils avaient été prendre une bière ensemble. A son retour, constatant ma disparition, il m'avait cherché partout en vain. Je le voyais pourtant venir avec son baratin, à essayer d'endormir ma méfiance. Je me mis d'ailleurs à bailler comme je le faisais maintenant à chaque fois que je voyais un Volks. Sûrement une forme d'allergie! Je lui dis alors d'arrêter les frais, que son compte était bon et que je savais que c'était lui le chef de toute cette bande de mécréants. Au tout début, je lui avais pourtant fais confiance mais heureusement, maintenant j'y voyais clair et je savais que c'était lui qui avait tout manigancé depuis le début.

De plus, c'était un lâche! Comme je le harcelais impitoyablement, il me dit soudainement que le vrai chef de la bande c'était Thérésa, ma Vénus à bras. J'entrai alors dans une colère noire. De quel droit se permettait-il de salir la réputation immaculée de ma Vénus à bras. J'entrai dans une telle rage que les six autres durent se mettre à quatre pour m'empêcher de lui sauter dessus. Finalement je me calmai, probablement grâce aux regards attendris que me lançait ma Thérésa à travers la fumée de son Havane qui me faisait légèrement tousser. Je ramenai alors Thérésa à sa voiture où j'embarquai avec elle. Je recommandai aux autres de rester bien tranquille pendant que nous allions au village voisin téléphoner à la police. Je vis alors le soulagement se peindre sur leurs traits. Ils venaient sûrement de réaliser qu'enfin ils n'auraient plus à vivre avec le lourd fardeau de leur culpabilité et qu'ils pourraient finalement payer leurs dettes envers la société. Ce n'étaient finalement pas de si mauvais bougres après tout.

Rendu au minuscule village voisin, Thérésa me débarqua à une cabine téléphonique pour que je puisse appeler la police, en m'indiquant qu'elle avait quelques courses à faire en attendant. Une fois mon appel terminé, je déambulai longuement dans les trois rues du village pour passer le temps. En attendant que Thérésa aie fini ses emplettes, j'achetai une nouvelle montre qu'un jeune gars sympathique me vendit au coin de la rue. Toute une aubaine en plus! Une véritable RolexTM électronique pour seulement 99.95$!

Thérésa ne devrait plus tarder maintenant, ma montre indique 88:88!

88:88 ???

Aurevoir

Le dernier “Un des”


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