Le Détective Public...

Un Soulagement

Quand j’ai repris conscience, il faisait très sombre et j’étais sur le perron la face contre le tapis troué de l’entrée. Instinctivement je regardai ma montre mais il faisait tellement noir que je ne la vis même pas. En tâtant, je m’aperçus que la clef de la porte avait été remise dans un des trous du tapis, celui où j’avais la face et en me passant la main dans le visage, je sentis que la clef y avait laissé sa trace.

Je me relevai et constatai que j’avais dû passer la nuit de cette façon puisque mes vêtements étaient humides de rosée et que le soleil tentait de pointer à l’horizon. En regardant autour de moi je vis que mon taxi était en bas de la colline, moteur arrêté et phares éteints. Je pris donc cette direction, en évitant bien sûr la flaque de boue et en passant derrière la haie, (on ne me fait pas deux fois le même coup) mais je n’aurais pas dû; l’herbe mouillée et mes semelles toujours couvertes de boue humide me firent encore glisser et de nouveau devenir une fleur parmi les épines.

Je fini par me relever et me rendre au taxi. À l’intérieur, mon ami le chauffeur y grelottait recroquevillé sur le siège arrière. Lorsqu’il me vit, il se mit à m’invectiver dans une langue que je ne connaissais pas et quand il vit que je ne comprenais pas il me dit «Pourquoi t’a pris tant de temps, il n’y a plus d’essence et j’ai gelé toute la nuit en t’attendant». C’en était trop; je le pris par les revers de son veston et lui criai au visage toute mon indignation au sujet de sa conduite et lui demandai pourquoi il m’avait amené ici et pourquoi j’avais été attaqué dans l’ombre alors qu’il se trouvait en face de moi. Il entra alors dans une colère terrible. Il me pris par les revers et me montra toute son indignation envers le fait que je lui avais demandé de me rendre à cette maison, que j’y étais entré de plein gré et que maintenant je le blâmais de ce qui s’y était passé. Je vis même une larme couler le long d’une de ses joues et remarquai que cet homme avait sûrement dû beaucoup pleurer car de son oeil gauche descendait une ornière que j’aurais pu facilement, si je n’étais pas aussi perspicace, prendre pour une balafre résultant d’une bataille au couteau.

De nouveau je me pris d’amitié pour ce pauvre bougre qui faisait contre mauvaise fortune bon coeur, m'excusai de mon comportement enfantin, de n'avoir pas été assez clair dans mes directions au moment de monter à bord. Il me comprit et je ressentis un énorme contentement lorsque je vis un sourire de nouveau décorer son visage. Je lui dis alors «Partons maintenant». Il me regarda alors d’un air déconfit et me dit «On peut pas, on n’a plus d’essence, à moins que vous poussiez car moi je suis trop fatigué je n’ai pas dormi de la nuit». «Ça va aller» lui dis-je et je m’installai près du parechoc arrière et commençai à pousser. Au début, tant que nous étions sur l’herbe, je glissais souvent et il commençait à s’impatienter mais rendu sur la route de poussière je réussis à rester debout plus souvent et il reprit peu à peu son sourire.

Je le poussais depuis environ 30 minutes quand nous sommes arrivés à un poste d’essence.. Je lui criai de tourner mais il continuait. Je lui criai «tourne, tourne» il me dit «Non monsieur, je n’ai pas un sou à donner à ce fainéant; il n’a pas lavé mes vitres la dernière fois que j’ai pris de l’essence ici et j’ai décidé de toujours prendre mon essence ailleurs; il y a un autre poste d’essence juste un kilomètre plus loin et on va aller là». Je le compris car moi non plus je n’aime pas les gens qui traitent les autres injustement et je repris mon bouleau..

Quand le plein fut fait, il me demanda de régler la course immédiatement parce qu’il s’était fait voler au cours de la nuit et n’avait plus un sou pour régler la note. Je lui demandai combien je lui devais et il me dit que le compteur indiquait 43.35$ et qu’avec le pourboire 50.00$ suffiraient. «Ne trouves-tu pas que c’est beaucoup pour un petit voyage de sept kilomètres?» Il me dit alors «Si t’avais poussé plus vite ça aurait été moins coûteux et en plus je ne te charge rien pour t’avoir attendu toute la nuit». Je ne compris pas son raisonnement mais lorsque j’allais sortir mon porte-monnaie, je me sentis soulagé. Oui; moi aussi on m’avait soulagé de mon porte monnaie au cours de la nuit et que même ma montre était disparue. Il parut alors devenir fou de rage mais je le calmai rapidement en lui montrant que dans une petite poche à briquet j’avais trois billets de 20.00$. Il me les arracha des mains avec un sourire, alla régler l’achat d’essence et partit en trombe me laissant la ùn peu déconfit mais heureux d’avoir dépanné un ami même si celui-ci avait une drôle de façon de me taquiner en prétendant me laisser en plan après une telle aventure.

Marc


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