Le Détective Public...

Retour aux Sources

En me confondant en excuses envers la minuscule grand-mère sur laquelle je m'étais affaissé, la prenant pour un banc, et qui me frappait avec son sac à main rempli de noix de coco, je me dirigeai en titubant à travers les cages à poules et les 345 voyageurs de l'autocar 20 places qui m'emportait, pour découvrir à l'arrière deux places inoccupées de chaque côté d'un passager endormi. La chance me souriait encore une fois et je me précipitai vers une des deux places, avant que les autres occupants ne réalisent qu'ils n'avaient pas à s'asseoir à 5 sur le bord de la fenêtre pendant que de si beaux sièges étaient disponibles.

Dès le moment où je pris place, deux choses me frappèrent. Premièrement, le coude de mon charmant voisin de banc qui s'agitait en rêvant et deuxièmement l'odeur qui régnait dans les environs. Ma soupe de caméléon me refit ses effets sur le champ. Ce qui fit s'esclaffer les 45 personnes qui se tenaient le long du périmètre circulaire autour de nous où même les moustiques ne pénétraient pas. J'allais me pencher vers l'un des multiples trous dont était commodément agrémenté le plancher quand, à ce moment précis, la plus grosse des trois vaches décida de vêler!

C'en était trop, il n'était pas possible qu'une telle situation soit réelle et je m'efforçai de me concentrer et définir si oui ou non j'étais en train de faire un grotesque cauchemar. Comme je n'arrivais pas à me concentrer, j'en conclus que la réponse était OUI alors je décidai de me réveiller et de voir où en était la situation.

Une fois éveillé je remarquai que :

- L'autocar était bondé mais rien d'anormal, environ 30 passagers pour les vingt places.

- Il n'y avait aucun siège vide parce que l'odeur d'humidité nauséabonde qui pénétrait même nos vêtements était la même partout.

- Il n'y avait pas de vaches. Il y avait bien deux chèvres et huit poules mais elles étaient, comme il se doit, sur le porte-bagage extérieur à l'arrière du car avec quelques hommes et une douzaine d'enfants.

- Il y avait des moustiques partout.

Nous approchions de la forêt cahin-caha, par l'autoroute de la jungle à environ 10 k/h. Même si ma tête me faisait terriblement souffrir, je décidai d'admirer le paysage qui s'offrait à mes yeux et consistait surtout d'immenses arbres à lianes, de sapajous, d'alligators et d'oiseaux divers dont certains ressemblaient à des cacatoès. Il devait sûrement y avoir des caméléons mais leur couleur n'attira pas mon attention.

Comme nous étions parti vers 18h15 et qu'il ne faisait pas encore noir, je n'avais dû dormir que quelques minutes parce qu'à Cayo-Caca il fait nuit à 18h57 précises quel que soit le temps de l'année.

En entrant dans la forêt, une fraîcheur et un baume suave envahirent le car. C'était tout simplement merveilleux et extrêmement reposant et sur ce je m'endormis béatement ... jusqu'à ce que je sois subitement réveillé par les derniers crachotements du moteur de l'autocar qui s'arrêta doucement au pied d'une petite colline. En voyant le chauffeur gesticuler et vociférer en essayant de recruter des volontaires pour pousser l'autocar jusqu'à Médépan, je filai à l'anglaise (mon catimini ayant toujours sa crevaison); j'avais assez poussé de véhicules divers dans toute cette histoire pour ne pas m'y faire reprendre.

Tout en marchant, je repensais aux paroles de mon ami Sam qui m'avait si gentiment placé dans l'autocar. Pourquoi m'avait-il dit qu'il s'appelait Manuel? Est-ce que, par hasard, il s'agissait du fameux Manuel d'Instructionne que je cherchais depuis plusieurs épisodes? Mais que faisait-il à Cayo Caca? Pourquoi n'était-il pas à Médépan, tel que prévu? Ces questions me mélangeaient de plus en plus et je décidai d'attendre d'avoir dégrisé pour me les poser et je continuai à marcher en direction, du moins je l'espérais, de la villa de ma Thérésa pour lui raconter mes mésaventures.

Au bout de plusieurs heures de marche, j'arrivai finalement à la fameuse villa. Malheureusement, elle était complètement sombre et les fenêtres et les portes étaient barricadées. En me servant du marteau intégré à mon canif scout miniature, je m'empressai de déclouer un des panneaux et je réussis à pénétrer dans le bâtiment. Tant bien que mal, je parvins à reclouer le panneau à sa place originale et croyez-moi, ce n'est pas facile à faire, de l'intérieur! Je commençai alors à explorer la villa et, dans la cuisine, je trouvai une lettre et une enveloppe contenant vraisemblablement une forte somme d'argent. Comme elle était généreuse ma Thérésa! Elle me dédommageait pour tous les inconvénients que j'avais subis depuis le début de cette aventure! Comme il faisait très noir et que, bizarrement, la lettre que m'adressait ma Thérésa était écrite en espagnol, je décidai de la mettre dans ma poche, avec l'argent, et de la lire plus tard.

Je sortis de la villa de la même façon que j'y avais pénétré et me dirigeai vers l'aéroport afin de retourner au bercail pour retrouver ma Thérésa, mon truand et peut-être même mon canari. A l'aéroport, je trouvai un pilote qui accepta, contre la moitié de mon enveloppe d'argent de me ramener au pays dans son magnifique Cesna décapotable habilement réparé à l'aide de panneaux métalliques jaunes et noirs sur un desquels on pouvait lire : "Attention, ce véhicule s'arrête à tous les passages à niveau". C'est probablement pour ça que tout le long du voyage, le pilote vola en rase-mottes le long des côtes, en évitant les endroits éclairés; il ne voulait surtout pas me ralentir en arrêtant à tous les passages à niveau.

Rendu à destination, je l'aidai à débarquer de nombreux paquets de détersif en poudre ou de farine, il ne voulut pas me dire quoi au juste, et je m'éclipsai rapidement en entendant des sirènes de police s'approcher de notre point d'atterrissage. C'était sûrement mes collègues de la police qui voulaient fêter avec moi mon retour mais j'aimais mieux rester incognito pour l'instant afin de faire une surprise à ma si généreuse Vénus à bras et surprendre, la main dans le sac mon truand et tous ses comparses.

Je trouvai rapidement un taxi et une heure plus tard, je débarquai au pied d'une petite colline en haut de laquelle se dressait une vieille maison délabrée qui apparaissait comme collée devant l'immense pleine lune juste derrière. J'avais l'intime conviction que c'était ici que se trouvait la clé de l'énigme, le fin mot de l'histoire, la réponse à toutes mes questions. Je passerais ici autant d'épisodes qu'il le faudrait mais j'arriverais à mener à bien cette enquête.

Guy


Suite

Précédent

Accueil